Rebelles

Rebelles

Share this post

Rebelles
Rebelles
Pardonner à sa mère et réparer les viols en soi

Pardonner à sa mère et réparer les viols en soi

GRAND ENTRETIEN - Nous avons parlé domination masculine, maternité intrusive, tatouages, grossesse, et de ce qui peut aider à réparer les ravages du viol en soi avec la poétesse de génie Rim Battal.

Avatar de Judith Duportail
Judith Duportail
févr. 03, 2025
∙ abonné payant
53

Share this post

Rebelles
Rebelles
Pardonner à sa mère et réparer les viols en soi
2
2
Partager

Bonjour ma chère soeur,

Je suis super heureuse cette semaine de te partager ma discussion avec la poétesse et écrivaine Rim Battal. Comme toujours quand j’interviewe des gens que j’admire, je suis NULLE. Fort heureusement à l’écrit on s’en rend un peu moins compte. J’admire beaucoup Rim Battal pour ses qualités d’écriture, bien sur, mais aussi car elle ne semble faire preuve d’aucune misogynie intériorisé. Le regard précieux qu’elle porte sur le féminin permet de se considérer soi-même avec cette lumière, et ça c’est price-less.

Rim est marocaine et vit à Paris. Son recueil de poésies L’eau du bain m’a mis une énorme baffe car nulle part ailleurs j’avais lu une approche si vraie, si juste, si belle et crue de la maternité et de la subjectivité féminine. A la fois sur le fait de devenir mère mais aussi d’être la fille d’une mère. Rim décrit si bien l’empreinte que laisse une mère fusionelle, intrusive, qu’on aime et qui ne nous quitte jamais, même dans les moments qui ne la regardent pas, surtout dans les moments qui ne la regardent pas : “J’ai baisé pour toi, quitté des hommes pour toi, séduit d’autres pour toi. Je me suis mariée pour toi, pour me débarasser de toi en te contentant. Je vais te faire des enfants. Ils seront autant les tiens que si nous les avions fait ensemble dans un lit, nues toutes les deux.”

Autres exemples mic-drop :

“Ma première fois s’est très bien passée / Comparée à un viol”

“L’épuisement. Ce n’est pas la fatigue l’épuisement. C’est la fuite de toute substance de la tête par les pieds qui fait flaque entre les jambes comme si dans un accès de démence, l’ont eu pissé son âme.”

“Salut la vie ; / Deux naissances pour deux viols./On est quittes./ Bien à toi”

Elle vient de sortir un roman, Je me regarderai dans les yeux. C’est l’histoire d’une jeune femme dont la mère a exigé un certificat de virgnité. C’est l’histoire d’un viol institutionnel, d’un médecin qui a accepté de délivrer ce papier, d’une famille qui a accepté de soumettre une enfant à ce geste. On ne sait pas quand on lit le livre si c’est vraiment arrivé à Rim ou pas, mais ce n’est pas la question. Ce qu’on sait, pour sûr, c’est que c’est arrivé à quelqu’un. C’est tout ce qui compte. C’est un livre brillant et encore d’une immense intelligence. Un dernier petit extrait mais après je vous laisse aller l’acheter :

“L’on peut désigner les personnes les plus progressistes, les plus ouvertes sexuellement, elles s’assombrissent immanquablement, se recroquevillent, lorsqu’il s’agit de la sexualité de sa descendance. La sexualité se recouvre soudain d’une pellicule opaque et sale, devient infamante, comme si sexualité et viol étaient une exacte même chose, parce qu’au fond, leur peur muette, impossible à formuler, c’est ça : le viol et son impunité.”

Moi : Qu’est-ce qui t’as fait passer de la poésie à la littérature ?

Rim : La poésie c’est de la littérature !

Tu as raison, c’est con.

A la base, j’écrivais les deux. De la poésie, des nouvelles, je viens du journalisme. Parce que je voulais écrire un roman à la base j’ai fait une école de journalisme parce que je pensais apprendre à écrire. Mais en réalité l’écriture journalistique est très contraignante. Et quand tu écris dans une forme, elle te prend, tu n’arrives plus à écrire dans une autre. Certains ont cette souplesse, de passer de l’une à l’autre, mais pas moi. Le journalisme me bouffait, je n’arrivais plus à écrire, donc j’ai démissionné.

Ce post est destiné aux abonnés payants.

Already a paid subscriber? Se connecter
© 2025 judith
Confidentialité ∙ Conditions ∙ Avis de collecte
ÉcrireObtenir l’app
Substack est le foyer de la grande culture

Partager