Rebelles

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Se perdre

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Judith Duportail
nov. 21, 2025
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Ma soeur,

Je me réjouis de pouvoir enfin me poser pour t’écrire. J’ai envie de te raconter ce que je traverse comme à une amie. Ces dernières semaines ont été très difficiles. Je suis sous antibio, cortisone, cure de vitamines, magnésium, j’ai acheté des huiles essentielles et des diffuseurs pour chaque pièce de ma maison, on a (ENCORE!) augmenté ma dose d’antidépresseur, je prépare ma riposte! Reste que je me sens très fragilisée. Je m’étais armée de patience pour les deux premières années de crèche, à me dire que ma vie serait entre-coupée par les maladies, mais que cela continue encore cette année me demande trop de force.

Je me suis perdue, ces derniers temps, dans la maternité. J’ai oublié quelle mère je voulais être et surtout qui j’étais. Ça me fait mal de le dire, mais je me suis retrouvée à devenir la mère que personne ne veut être, celle qui fait tout le temps la tronche, dit non à tout, les sourcils toujours froncés. Faut dire que c’est dur, putain. Le truc dont j’en peux plus le plus c’est d’être tout le temps engoncée. Engoncée avec la poussette, la porte qui me tombe sur l’épaule, d’avoir tout le temps trop chaud, d’avoir jamais la place de passer avec ma poussette (ou avec les vélos ou globber c’est pareil). Et d’être jamais ou presque pimpante ou sexy. Mais je ne veux pas écrire tout un texte pour me plaindre. Juste pour expliquer que c’est cet épuisement qui m’a fragilisée, et je me suis retrouvée à perdre un peu mon noyau. A culpabiliser pour tout, à croire que tout ce que je lisais sur Insta ou ailleurs était vrai, que chaque conseil était parole d’évangile. C’est comme si j’avais intégré dans ma tête toutes les réflexions perfides d’Insta et des vieilles biques (désolée c’est pas sororale mais ça va deux secondes) dans la rue, que je les entendais marmonner “ah bah elle a voulu faire des enfants toute seule pour les mettre devant la télé, cette génération gna gna”. Que la dernière personne qui parlait avait toujours raison, comme si tout ce qu’on me disait était forcément vrai. Que j’avais pas mon propre cerveau, ma propre capacité d’analyse capable d’évaluer une situation. Et que la maternité c’était forcément suivre tous les dogmes à la mode, qui par ailleurs changent régulièrement.

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